Je suis maman.
C’est assez nouveau … c’est venu avec le printemps, ce 21/ 03/2022.
Je suis maman, et ce n’est pas inopiné comme nouveau statut. On a eu le temps d’y penser, de fantasmer sa bouille, de décrire l’accouchement souhaité dans un projet de naissance et surtout, d’imaginer ce qu’on ferait « d’office » ou « au grand jamais » et ce, pour les 20 prochaines années.
Et puis la poche des eaux s’est fissurée 3 semaines avant l’heure et ce fut le début des adaptations…
Je pensais me mettre en route pour la maternité le plus tard possible, histoire de rester dans une bulle chaleureuse à domicile et laisser l’ocytocine fonctionner au mieux, de peut-être même me passer de péridurale. A la place, je suis restée 74 heures au bloc naissance dans une chambre pas franchement prévue pour un long séjour. Autant dire que le contenu de la petite valise n’était pas adapté et que la réserve de barre céréales n’a pas suffi. Le projet de naissance, lui est resté dans ladite valise et, au moment qui m’a semblé le bon – à moi – l’anesthésiste a fait une grosse piqure dans mon dos, oui oui. L’important c’est de donner naissance, de se sentir bien, soutenue, entourée, écoutée, aimée. L’important, c’est de pouvoir changer d’avis, et de l’exprimer sans crainte. Il n’y a pas de bonnes mères en maison de naissance pour un accouchement physiologique sans péridurale et de mauvaises mères qui la réclame à 2 cm.

Je pensais allaiter, idéalement jusqu’en septembre. L’OMS recommande l’allaitement exclusif jusqu’à 6 mois et tout le monde s’accorde à dire qu’il n’y a pas mieux pour bébé. L’OMS et les sage-femmes ont surtout le don de culpabiliser, quand rien ne va comme souhaité, qu’on est déjà un peu frustrée et qu’il n’est pas tout à fait évident de gérer ses émotions… Bébé est arrivé un peu trop tôt et pas franchement gros ? Il ne tête pas bien – ça l’épuise – et on le complémente au lait artificiel ? Qu’à cela ne tienne, on va mettre le tire-lait à maman toutes les 3 heures nuits et jours sans lui demander clairement son avis. Et puis on va la culpabiliser car elle ne produit pas assez de lait. Ce que les sage-femmes oublient c’est qu’au-delà de l’allaitement, l’important c’est le bien-être de tout le monde: bébé, papa et maman. L’important c’est un minimum de sommeil et de sérénité. L’important c’est de limiter les situations qui finissent par faire pleurer, de rage, d’épuisement, de culpabilité… Il n’y a pas de mauvaises mères qui donnent le biberon et de bonnes mères qui allaitent.

Je pensais être capable de résister aux stratagèmes du secteur de la puériculture. Dans un premier temps, aucune place à l’émotionnel, j’ai dressé une liste exhaustive de presque tout ce qui existe, du plus hurluberlu au plus indispensable et pour chaque article, je me suis posé trois questions : est-ce bien utile, indispensable ou juste pratique ? Est-ce que je l’achèterais volontiers en seconde main ou pas (le matelas est neuf, par exemple, le parc est d’occasion). Est-ce qu’un autre article ne ferait pas le job (faut-il un lit spécial cododo quand le lit à barreaux a un côté amovible ?). Ensuite, l’émotionnel a refait surface (mais maitrisé) : nous avons quand même fait une liste de naissance, dans un magasin spécialisé, en sélectionnant des articles « trop mimis » ou « cette version-là est quand même top ».
Le bilan est finalement plutôt bon : énormément de récup’ et d’occasion (table à langer, parc, lit, gigoteuses, tétras, vêtements, draps, livres d’enfants, cosy, porte-bébé…), quelques pièces clés neuves pour leur aspect pratique ou adapté à notre style de vie et qu’on n’a pas trouvé d’occasion et puis quelques jolies choses sur la liste.
Je suis restée loin des soi-disant indispensables à tout parent qui se respecte : pas d’écoute bébé supersonique avec caméra infra-rouge chez moi, pas de chauffe biberon ou de Baby Cook alors que j’ai casseroles et micro-onde, pas de poubelle qui emballe chaque couche de manière individuelle, pas de transat qui balance bébé tout seul, pas de … la liste peut-être très longue. Pourtant, j’ai une amie qui, elle, a ressenti le besoin d’un babyphone qui entendrait son bébé sur la lune alors qu’elle vivait dans un 60m² bruxellois. Et qu’est-ce que j’en pense ? Que l’important, c’est de se sentir à l’aise, rassuré. Si papa a besoin d’un Baby Cook pour passer un tablier et cuisiner pour bébé (et donc soulager maman), ou si maman a besoin d’une caméra pour rester sereine quand bébé est seul de l’autre côté du mur, très bien ! Il n’y a pas de bonne mère avec une liste de matériel minimaliste et de mauvaise mère qui se laisse influencer par le secteur de la petite enfance.
Je ne suis certainement pas au bout de mes questionnements, je ne suis maman que depuis 8 semaines et j’ai encore un paquet de principes à remettre en question sans culpabiliser : les jeux en bois, les petits pots industriels, l’usage des écrans, les kilos de langes et lingettes, les matériaux durables et les conditions de fabrication de ce qui rentre dans la chambre de ma fille … sans parler de son éducation !
En 8 semaines, ce que je réalise surtout, c’est qu’il y a l’idée que l’on se fait de tout ça, de la vie de parent, de famille, et puis il y a ce qu’on peut réellement mettre en place, dans le respect de ses valeurs et de soi-même (sa fatigue, son temps) mais aussi face aux faits, aux évolutions de bébé, aux cadeaux et bonnes intentions qui rencontrent plus ou moins nos goûts et désidératas, aux évènements, bien réels eux, loin des fantasmes de parents en devenir.
C’est comme ça qu’on se retrouve malgré soi avec 9 biberons et 15 tétines quand on pensait allaiter. Il a fallu trouver la tétine ni trop molle ni trop dure. Evidemment, elle n’était pas adaptée aux biberons déjà présents à la maison. Plus tard, on a changé de lait, on a donc changé de tétine… Bref. C’est comme ça qu’on réalise que la garde-robe 0-6 mois en full récup ou presque ne pourra pas suffire: la miss a dû mettre du préma (qu’il a fallu acheter dardar) et quand elle aura enfin la bonne taille, les petits vêtements ne seront plus adaptés à la saison. C’est comme ça que deux écharpes de portage passent la porte de la maison parce que le premier modèle était trop grand pour la petite puce. Oui, il y a eu quelques ratés et au final, il n’y a pas de bonnes mères trop prévoyantes et de mauvaises mères qui courent au magasin à la dernière minute… ou inversement, dans ces cas précis.
Il n’y a que des papas et des mamans qui font de leur mieux, s’adaptent au jour le jour, pensent souvent qu’ils pourraient en faire plus, puis regardent leur nourrissons, bienheureux, repus et (enfin) silencieux et … filent au lit !

Merci pour ce magnifique article plein d’émotions.
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